AFP Média Services

AFP Média Services : lettre ouverte du SNJ au PDG

Voici le texte d’une lettre que les élus AFP du Syndicat national des journalistes (SNJ) viennent d’adresser au PDG Emmanuel Hoog, à propos de la sous-filiale AFP Média Services :

   Monsieur le Président-Directeur général,

   Le 22 mai dernier, vous avez informé le comité d’entreprise de votre intention de créer une filiale de second rang, AFP Média Services, afin de regrouper les activités journalistiques aujourd’hui assurées par AFP Services (fourniture de contenus rédactionnels à orange.fr et rtl.fr, notamment). Vous avez alors expliqué aux représentants du personnel que la création de cette sous-filiale – elle-même filiale d’AFP Services – était le seul moyen pour que les journalistes assurant ces activités puissent avoir la carte de presse, qu’ils attendent effectivement depuis de longs mois, ce qui n’avait pas été anticipé par la direction de l’Agence. De fait, la carte d’identité des journalistes professionnels ne peut être accordée qu’à des collaborateurs d’entreprises réalisant plus de la moitié de leur chiffre d’affaires avec des clients médias, ce qui n’est pas le cas de la filiale de premier rang AFP Services, qui assure principalement une activité « corporate », de communication en faveur d’institutions ou d’entreprises, dans le cadre notamment d’un contrat passé avec la Commission européenne.

    Le Syndicat national des journalistes (SNJ) a toujours milité, en France comme à l’Agence, pour une séparation claire entre l’information et la communication. Nous avons du reste contesté que l’activité corporate de l’Agence, laquelle est une entreprise d’information, puisse être assurée par une entité dont le nom comporte le sigle AFP, au risque de brouiller l’image de la maison et de la marque. Aujourd’hui, il nous semble également contestable de penser que l’activité journalistique d’AFP Services puisse être, demain, assurée par la filiale d’une filiale corporate : l’information ne saurait en aucun cas être inféodée à la communication.

    Sur le fond, nous avons émis des réserves sur le principe même de cette activité d’ »animation éditoriale » – expression que vous avez vous-même jugée maladroite –  au profit de sites internet clients, un travail opéré « en fonction de la ligne éditoriale » du média passant commande. L’AFP, par le passé, a déjà réalisé ou imaginé des contenus « clé en main », mais elle en gardait la maîtrise éditoriale. Ici, le glissement est évident : on mêle la marque AFP à un contenu rédactionnel dont l’orientation est définie par le client, ce qui pose pour le moins question. Fallait-il s’engager dans cette voie périlleuse ? Le document produit en CE met en avant les « belles perspectives commerciales » liées à ces activités, sans les démontrer. Par ailleurs, l’argument selon lequel l’AFP investit ce créneau pour éviter que d’autres l’occupent à sa place, au risque de lui faire perdre du chiffre d’affaires potentiel, nous paraît faible : l’AFP ne peut tout faire, partout, tout le temps, elle assume et doit assumer des choix en permanence. Notamment quand il n’est pas établi que l’avantage (commercial en l’occurrence) prime sur le risque (en termes d’image de marque) encouru.

    Admettons cependant que ces activités perdurent. Le moindre des engagements que l’on pourrait attendre d’une maison comme l’AFP serait de conférer des droits sociaux non dérogatoires aux jeunes journalistes (six en mai 2014, en CDD à temps plein) qui les assurent. Ces derniers, qui pour la plupart ont passé les tests de la bourse AFP et caressent légitimement l’espoir d’une passerelle vers la maison-mère, ont certes des contrats de travail respectant la convention collective nationale des journalistes. Mais leurs droits aux congés, leur base de rémunération sont pour le reste inférieurs à ceux des journalistes de statut du Siège. S’il est compréhensible que l’AFP s’appuie sur des journalistes à statut local ou régional dans son réseau mondial, ne serait-ce que pour se conformer aux législations nationales ou aux souhaits de certains collaborateurs, le SNJ ne peut accepter qu’en France, au sein-même des locaux parisiens de l’AFP, des statuts différents perdurent.

    Il y a un moyen de sortir par le haut de cette situation : c’est d’accorder à ces jeunes journalistes, même en CDD, le statut du Siège. Comme il n’est effectivement pas souhaitable que l’activité qu’ils assurent, laquelle ne relève clairement pas de la mission d’intérêt général de l’Agence, soit opérée directement par l’AFP, ces jeunes journalistes pourront être détachés vers la future filiale AFP Médias Services – que nous souhaitons de premier et non de second rang, comme nous venons de l’écrire. Vous l’avez fait pour les responsables d’AFP Services, qui n’ont évidemment pas renoncé à leurs droits sociaux AFP, et c’est bien normal, en rejoignant la filiale. En étendant cette mesure de détachement à leurs collaborateurs, vous afficherez l’ambition que vous avez pour cette activité qui, si elle est encore balbutiante et ne sera jamais centrale dans le chiffre d’affaires de l’Agence, ne doit pas être condamnée à être portée par une sous-filiale low cost.

    Alors que votre politique de filialisation est l’objet d’inquiétudes au sein du personnel, nous sommes convaincus qu’une remise à plat de votre projet « AFP Média Services » serait de nature à apaiser certaines tensions.

    Nous vous prions de croire, Monsieur le Président-Directeur général, en l’assurance de nos sentiments distingués.

Les délégués, élus et représentants SNJ à l’AFP

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