Conditions d’exercice des journalistes : le ras-le-bol, c’est maintenant !

Dans un souci d’économies, la direction vient d’annoncer à la fois la fin des forfaits journée lors des missions (sauf cas exceptionnels) et une réduction drastique des notes d’invitation avec des enveloppes réduites de 40% dans certains services. Un coup de canif de plus dans les conditions d’exercice des journalistes.

Ces annonces surviennent dans un contexte de disette salariale (aucune augmentation générale depuis plusieurs années) et de quasi absence de primes et promotions depuis la même date (le budget ridicule de primes de cette année n’a leurré personne).

Donc les salaires stagnent, le pouvoir d’achat diminue. Et ce, en dépit de journées toujours plus longues, dues à la nécessaire veille de l’information et aux effectifs très serrés dans tous les services parisiens et les bureaux, en province comme à l’étranger.

Et tout indique que les rémunérations ne vont pas repartir à la hausse: dans le cadre de la négociation de l’accord d’entreprise, la direction a annoncé il y a plusieurs mois un mécanisme d’augmentation basé sur les performances de l’entreprise qu’elle n’a jamais pris la peine de préciser. Plus le temps passe, plus ce principe d’augmentation paraît illusoire.

Parallèlement, le PDG de l’AFP a signé un contrat d’objectifs et de moyens (COM) avec l’Etat en s’engageant à limiter la hausse annuelle de la masse salariale à 1%! Soit moins que ces dernières années, marquées par la mise en sommeil de la politique salariale…

Toujours dans le cadre des discussions sur l’accord social, la direction prévoit une forte baisse des RTT, très partiellement compensée par un congé d’ancienneté qui irait de 2 à 6 jours. Au final, une chose est sûre : le nombre de jours travaillés va augmenter.

Concernant les astreintes du soir et de la nuit, pour entrer dans un cadre légal – la direction semble avoir découvert que des compensations en temps ou en argent sont obligatoires -, il a été mis sur la table la disposition suivante: une journée de récupération pour… dix astreintes. Autant dire, quasi rien du tout. La compensation pour le travail effectif pendant ces astreintes suit une méthode de calcul pour le moins curieuse: une heure récupérée jusqu’à trois heures travaillées, trois heures jusqu’à six heures travaillées. Qui peut trouver cela acceptable ?

Où sont les contreparties?

Le SNJ est à la table des discussions depuis le début, à l’automne 2013: à l’époque le PDG avait assuré qu’il y aurait des efforts à faire mais aussi des contreparties. Nous le citons de mémoire : « Il y aura des plus et des moins ». La colonne des moins est désormais bien remplie. Mais les plus, où sont-ils ? Et ce sont désormais les conditions d’exercice (la possibilité d’inviter des interlocuteurs) et le cadre des missions (plus de forfait) qui sont attaqués.

Les enveloppes allouées aux frais d’invitation étaient déjà très mesurées. Pour nombre de rubricards, ces invitations sont incontournables. Elles permettent de lier ou d’entretenir des contacts privilégiés avec certaines sources. C’est comme cela qu’on obtient ensuite la bonne info au bon moment. Priver les journalistes de cette possibilité entrave tout simplement leur travail. Avec la baisse prévue, il resterait parfois à peine une invitation par mois…

Et les conditions de remboursement de ces maigres invitations sont, là encore, sensiblement durcies : on sera prié de donner le nom de l’invité. Mais comment protéger ses sources, ce qui n’est pas un droit mais un devoir pour tout journaliste ?

La direction a cru trouver la parade : selon elle, il suffira de murmurer le nom de cette source à l’oreille de son chef de service qui, seul, prendra la responsabilité de le garder éventuellement secret. Franchement, de qui se moque-t-on ? La protection des sources est une obligation légale, qui engage la responsabilité individuelle de tout journaliste, ce n’est pas un hochet dépendant du bon vouloir d’un supérieur hiérarchique !

Le SNJ demande le retrait pur et simple de cette nouvelle règle infantilisante, soupçonneuse et illégale.

Pour les frais de mission : tant pis pour ceux qui travaillent sans compter et mangent un sandwich sur le pouce, ce qui est le lot de nombreux journalistes en mission. Le forfait, c’est terminé. Sans compter que les aléas du métier ne permettent pas toujours, dans l’urgence ou certaines conditions, d’obtenir des notes de frais.

Résumons : les augmentations générales ? Perdues de vue. Les primes et promotions ? Minimes et même insuffisantes pour compenser les retards de carrière les plus flagrants. La prise en compte des astreintes ? Ridicule, selon le plan de la direction, et même de nature à faire perdre de l’argent à quelques journalistes dont les compensations actuelles sont plus intéressantes. Et voilà maintenant qu’on s’en prend aux remboursements des frais, qui n’est pourtant pas ce qui coûte le plus cher à une entreprise, surtout quand ces frais sont raisonnables, comme c’est le cas dans les bas étages de l’Agence.

On voudrait décourager une rédaction soumise à une très forte actualité au cours de très longues journées qu’on ne s’y prendrait pas autrement. L’engagement passionné des journalistes a des limites : qui va continuer à travailler sans compter son temps en voyant ce qu’il touche à la fin du mois diminuer, et avec la perspective que ses conditions d’emploi vont empirer ?

La direction a affirmé dans sa note qu’elle avait décidé de réduire les frais d’invitation afin de maintenir le budget des missions. Maintenir, vraiment? Tous les chefs de service et de bureaux peuvent en témoigner: les budgets des missions ont été largement amputés ces dernières années.

Le SNJ a en tête d’autres pistes d’économies et se tient à la disposition du PDG et de sa direction pour en discuter.

Il leur demande de reconsidérer la baisse des budgets et les nouvelles règles d’invitation, de même que la fin des forfaits journée lors des missions.

Trop, c’est trop, M. Hoog !

 

 

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