Plan Fries de « transformation » de l’AFP : où est le projet éditorial ?

Le PDG de l’AFP, Fabrice Fries, a confirmé la semaine dernière sa décision de mettre en oeuvre son plan dit de « transformation », qui prévoit la suppression nette de 125 emplois, après avoir reçu l’engagement que l’Etat verserait à l’Agence 17 millions d’euros sur deux ans.

Plus de trois mois après sa présentation devant le conseil d’administration, ce plan ressemble avant tout à une équation financière à multiples inconnues.

Où se cache le projet éditorial ? Quelle information allons-nous produire demain ? Quels schémas d’organisation la direction a-t-elle en tête pour permettre à l’AFP de se maintenir au rang qui est le sien et remplir sa mission d’intérêt général ? Autant de questions aujourd’hui sans réponses, malgré les interrogations légitimes exprimées par le personnel et ses représentants.

Le Syndicat national des journalistes (SNJ), premier syndicat de la profession en France comme à l’AFP, le répète depuis plusieurs mois: une suppression nette de 125 emplois — dont 40 de journalistes — n’est pas soutenable et menacerait, si elle était mise en oeuvre, notre capacité à fournir une couverture « généraliste de l’actualité de manière honnête, complète et variée » (Fabrice Fries lors de ses vœux). Ce constat semble d’ailleurs largement partagé à tous les étages du Siège et au-delà.

Des départs volontaires auront lieu. Certains salariés ne font pas mystère de leur intérêt pour un « guichet ». L’enjeu, pour le SNJ, c’est le taux de remplacement de ces candidats au départ, qui doit rester proche de 100% chez les journalistes (tous statuts), et le plus haut possible chez les personnels techniques et administratifs. Et ce quel que soit le cadre juridique choisi — plan de départs volontaires (PDV), rupture conventionnelle collective (RCC), accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) —, sur lequel là encore la direction entretient un flou anxiogène.

Pour créer une trentaine de postes indispensables au développement de notre production vidéo, ce sont pas moins de 70 emplois de journalistes que la direction prévoit sans doute de supprimer.

C’est considérable.

Pas besoin d’être grand clerc pour imaginer que ce sont les contrats de statut Siège, en premier lieu à Paris, mais aussi en province et dans les bureaux de l’étranger qui devraient être très majoritairement mis à contribution. Bien sûr, des réorganisations, par exemple entre services parisiens, ou encore au sein de l’édition, sont toujours envisageables. Mais ces changements doivent être nourris par une réflexion éditoriale, le souci de la cohérence et de l’amélioration de nos contenus pour nos clients, et non précipités sous la contrainte budgétaire ou imposés verticalement après une parodie de « co-construction » horizontale largement jouée d’avance.

Si nous voulons faire plus et mieux (plus de nouveaux formats, de papiers et autres contenus enrichis, de journalisme de vérification, de données et surtout de terrain), et la rédaction le veut ! , nous ne le ferons pas avec plusieurs dizaines de postes en moins. L’Agence France-Presse doit continuer à marcher sur deux pieds, France et Monde, qui font ensemble toujours sa force et sa singularité.

Le SNJ s’opposera à une réduction de voilure qui pourrait s’apparenter à un démantèlement de la rédaction française de l’AFP, dont l’étendue et la profondeur de couverture sont reconnues.

La direction réunira les organisations syndicales le 21 janvier pour une « réunion de préparation en vue de l’ouverture de la négociation sur le plan de transformation ». Nous lui demanderons d’approfondir certaines pistes d’économies négligées, notamment toutes celles qui ne concernent pas l’évolution — déjà très maîtrisée — de la masse salariale. Ou encore de recalculer « l’effet noria » (remplacement des départs par des salariés plus jeunes et à la rémunération plus basse) sur le périmètre rédactionnel, sans doute plus profitable qu’évoqué dans un premier temps. Aucun accord ne sera possible si la direction ne creuse pas les pistes alternatives à la suppression nette de postes, qui ne peut être qu’un dernier recours.

Enfin, comment la direction compte-t-elle procéder dès ce premier semestre à 50 départs non remplacés (!), dont 18 de journalistes ? Cela équivaudrait à rompre unilatéralement le « pacte social » en vigueur à l’Agence avant même le début d’un accord, qui paraît aujourd’hui plus qu’incertain.

 

Publié dans Communiqués

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